Quatre mois après son accession à la Primature, le Premier ministre Garry Conille peine toujours à combattre l’insécurité et à préparer le pays pour les élections, pourtant considérées comme sa mission prioritaire. Faut-il en conclure que les promesses de changement sont déçues ? Serait-ce l’ampleur de la crise qui le dépasse ? Où réside le blocage ? Pourquoi ne parvient-il pas à trouver la solution ? Est-il victime de forces obscures ? Est-il entouré de collaborateurs aux agendas contraires, qui chercheraient à tirer profit de son éventuel échec pour s’imposer, ou à propulser leurs propres clans politiques au sommet de l’État ?
Lorsque le Conseil présidentiel de transition a annoncé Garry Conille comme Premier ministre, la majorité de la population a applaudi ce choix. Pour de nombreux observateurs, cet ancien haut fonctionnaire des Nations Unies représentait le profil idéal pour diriger le gouvernement en ces temps de crise sécuritaire et politique. Sans lien avec aucun parti politique et détaché des conflits qui gangrènent le pays, il semblait en position de mener des élections en toute indépendance et de résister à l’influence des groupes de pression, y compris ceux liés aux gangs.
Cependant, le choix de deux anciens ministres, Nesmy Manigat et Édouard Junior Camille, respectivement chef de cabinet et secrétaire général, occupant ainsi les deux postes les plus importants de la Primature aux côtés de Garry Conille, a semé le doute. Plusieurs voix s’élèvent aujourd’hui, remettant en question la capacité de Conille à apporter des résultats. Son chef de cabinet, Nesmy Manigat, ancien ministre de l’Éducation nationale, a laissé un bilan controversé et une série de tensions dans le secteur éducatif. Quant à Édouard Junior Camille, il est accusé d’avoir utilisé le ministère de la Justice à des fins de persécutions politiques au profit de l’ancien président Jocelerme Privert. L’arrestation de Guy Philippe et son extradition aux États-Unis en sont souvent cités comme exemples.
Pour certains critiques, la présence de ces deux personnalités aux côtés de Garry Conille compromet ses chances de réussite. En effet, MM. Manigat et Camille sont considérés comme des proches de deux anciens présidents, Michel Martelly et Jocelerme Privert, tous deux cherchent à reprendre à tout prix le pouvoir. Édouard Junior Camille serait sous l’influence de Jocelerme Privert, tandis que Nesmy Manigat, fait ministre à deux reprises par Martelly, resterait fidèle à ce dernier, dans l’espoir de devenir un jour son Premier ministre. Actuellement, le nom de Manigat circule même sur les réseaux sociaux comme un potentiel conspirateur, cherchant à déstabiliser le Premier ministre Garry Conille et à mobiliser des propagandistes pour ternir son image dans la presse.
Ainsi, la question persiste : Garry Conille pourra-t-il mener à bien son mandat avec un entourage aux agendas contraires ?
Marc-Arthur H. François