Lors d’une conférence de presse tenue le lundi 29 juillet à Delmas, les plateformes sociopolitiques Viv Ayiti et INIFOSH ont vivement critiqué la gestion du directeur général de la Police nationale d’Haïti (PNH), Normil Rameau. Au cœur de graves accusations : l’utilisation opaque et inefficace d’une enveloppe de 177 millions de gourdes débloquées récemment par le gouvernement pour mener des opérations contre les gangs armés.
Selon les intervenants, le bilan de ces fonds est « tout simplement catastrophique ». Le porte-parole de Viv Ayiti, Rony Timothé, a dressé un tableau particulièrement sombre de la situation sécuritaire. Il évoque une absence totale de résultats concrets sur le terrain, malgré les moyens mobilisés. « Les commissariats continuent d’être attaqués, les véhicules blindés brûlés, les policiers tués ou portés disparus. Où sont passées ces millions de gourdes ? », s’est-il interrogé.
Plusieurs incidents récents ont été cités pour illustrer ce constat d’échec : l’incendie de blindés à Kenscoff à trois reprises entre mars et juillet, la destruction du commissariat de Fusy les 11 et 12 juillet, la mort d’un policier de l’UTAG à Lachapelle, et surtout le meurtre de trois agents de police à Liancourt le 19 juillet, pris au piège dans un blindé incendié par des gangs. « Imaginez les derniers instants de ces policiers brûlés vifs. Et pourtant, la PNH a banalisé ce drame », a dénoncé Biron Odigé, coordonnateur de Viv Ayiti.
Ce dernier appelle la population à ne pas se laisser distraire par les faits divers. « Ne tombons pas dans le piège de la diversion. Restons concentrés sur l’essentiel : l’échec flagrant de la gestion sécuritaire du pays », a-t-il exhorté.
Viv Ayiti va plus loin en révélant l’existence présumée d’une cellule secrète au sein de la PNH baptisée Une balle à la tête, qui aurait été mise en place par le DG Rameau lui-même. Selon M. Odigé, ce groupe, actif sur WhatsApp, aurait ciblé plusieurs figures critiques envers la hiérarchie policière, notamment lui-même, Rony Timothé, et Cossy David.
Ce dernier, dirigeant du mouvement INIFOSH, a également pris la parole pour lancer un cri d’alerte. Selon lui, le pays est au bord d’un nouveau cycle de violences. « Nan jou k ap vini yo, pral gen anpil kout zam ki pral chante. Se manm Kò Prèzidansyèl la k ap dèyè zak sa yo», a-t-il affirmé. Il a pointé du doigt Fritz Alphonse Jean, actuel coordonnateur du Conseil Présidentiel de Transition (CPT), l’accusant d’être le principal instigateur de manœuvres de déstabilisation, notamment dans le contexte de la transition entre Fritz Jean et Laurent Saint-Cyr au sein du CPT.
Pour les deux organisations, le haut commandement de la PNH doit rendre des comptes. « Où sont les preuves des opérations annoncées ? Où sont les corps des gangs, les armes saisies, les zones sécurisées ? », a insisté Rony Timothé reprochant à la PNH de publier des communiqués évoquant des succès de combat sans preuves réelles.
Alors que les autorités restent muettes face à ces graves accusations, Viv Ayiti et INIFOSH appellent à une prise de conscience collective. La sécurité nationale, disent-ils, ne peut être sacrifiée sur l’autel du mensonge institutionnalisé et de l’impunité.
Mario Jean-Pierre