Depuis le mois de février, l’actualité locale est prise en otage par ce fait perplexe qui laisse la grande majorité dans l’ombre. En guise d’informations, les rumeurs circulent de bouche en bouche jusqu’à créer la plus grande confusion autour de cette affaire. Et finalement, à moins d’un mois, le silence le plus absolu est gardé sur cette affaire déjà tombée dans l’oubli.
Que les choses sont faciles dans ce pays !
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Dans les lignes qui suivent, nous allons ressusciter les faits, illuminer des zones d’ombre et confirmer le manque de maturité et de prestige des dirigeants haïtiens.
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1er Fait : Arrestation des mercenaires par la PNH
Dans la nuit du 17 février 2019, la Police Nationale d’Haïti (PNH) a procédé à l’arrestation de 8 individus lourdement armés, à bord de deux véhicules, dans les proximités de la Banque de la République d’Haïti (BRH). Parmi ces 8 personnes, on a compté 1 haïtien et 7 étrangers, dont 5 américains, un russe et un serbe.
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2ème Fait : Guerre d’accusations entre autorités haïtiennes et membres de l’opposition
Ce qui a été le plus ridicule dans cette affaire, c’est que dès le lendemain, de manière puérile, une guerre d’accusations a été lancée entre les deux têtes de l’Exécutif d’une part et certains membres de l’opposition d’autre part.
Pour Jovenel Moïse, les mercenaires arrêtés visaient le braquage de la Banque de la République d’Haïti (BRH). D’après quelle source ? On ne sait pas !
Pour Jean-Henry Céant, ces mercenaires étaient là pour l’assassiner.
D’ailleurs, dans un tweet du Porte-parole du Premier ministre Pascal Adrien, ce dernier a déclaré que les mercenaires n’étaient pas venus braquer la BRH comme on veut le faire comprendre, mais ils voulaient escalader le toit de la BRH afin d’avoir le contrôle du bureau du Premier Ministre et du Parlement. Encore une fois, d’après quelle source ? On ne sait pas !
Pour ne pas se taire, Moïse Jean Charles de son côté avance que ces mercenaires étaient là pour un coup d’Etat contre le Président. Peut-être, l’ancien Sénateur devrait-il repasser ses notions de Droit constitutionnel pour établir la différence, entre un coup d’état, un coup de force, un pronunciamiento, un putsch, etc… Etant donné qu’il ne voulait pas passer inaperçu, il a donc lancé quelque chose. Toujours est-il, d’après quelle source ? On ne sait pas !
Le Sénateur Jean Renel Sénatus non plus n’a pas voulu rester indifférent. De ce fait, il a révélé que les 7 étrangers ont été accueillis à l’Aéroport international Toussaint Louverture par Jean Fritz Jean-Louis, ancien Ministre délégué auprès du Premier ministre chargé des questions électorales, sous la présidence de Michel Martelly.
Il poursuit en précisant que 5 d’entre eux sont arrivés le 15 février 2019, à 5h du matin, à bord d’un avion privé alors que les 2 autres sont arrivés le 16. Tant d’informations, mais d’après quelle source ? On ne sait pas !
Pourtant, selon certaines rumeurs, ces mercenaires ont affirmé qu’ils ont été en Haïti pour assurer la sécurité privée d’un homme d’affaires travaillant pour le compte du Gouvernement haïtien.
Nul ne sait à laquelle de ces allégations faut-il se fier !
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3ème Fait : Libération des étrangers sans explication à la Nation
Alors que l’instruction judiciaire devrait être ouverte pour élucider cette affaire, après seulement 3 jours de tractations, les 5 américains ont déjà été libérés de la Direction Centrale de la Police Judiciaire (DCPJ) dans l’après-midi du 20 février 2019 pour défaut de charge et transportés à l’aéroport internationale de Port-au-Prince en direction des États-Unis d’Amérique, sans aucune explication des autorités judiciaires à la population haïtienne. Le serbe et le russe, quant à eux, ont été évacués de la cellule de la DCPJ au cours de la nuit du 20 février, alors que l’haïtien, Michael Estera qui était avec eux était encore retenu en cellule.
Lorsque Michael Estera eu appris de la bouche de son avocat, que les étrangers avaient déjà laissé le pays et ont même été relâchés, il était fou de rage. Ce fut également à ce moment qu’il a appris la nouvelle de tentative d’assassinat du Premier ministre.
Pris de panique, il a affirmé qu’il est tout simplement un chauffeur et un traducteur et qu’il travaille à la compagnie Preble-Rish Haiti S.A depuis plus de 5 ans. Il a même juré qu’il ne savait pas ce qu’il y avait dans les valises des étrangers ; qu’il est un simple chauffeur et que son rôle c’est de conduire sans poser de questions, ni s’adresser aux Vip. D’ailleurs, il avance que la formule imposée aux chauffeurs est : Shut up and drive : taisez-vous et conduisez !
Cela sous-entend que les étrangers aussi, ils étaient là pour le compte de la compagnie Preble-Rish Haiti S.A. Mais quelle est cette compagnie ? Est-elle légalement enregistrée en Haïti ? À qui appartient-elle ? Toutes ces questions qui paraissent si claires sont pourtant très mystérieuses dans le cadre de cette affaire.
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4ème Fait : Plaidoyer de la Firme EXPERTUS en faveur de Michael Estera et sa libération
Alors que plus d’un cherchaient à comprendre le fin fond de ce dossier obscur, la détention du citoyen Michael Estera avait révolté beaucoup de personnes. C’est ainsi que la Firme d’Avocats EXPERTUS avait joué son rôle d’avant-gardiste en lançant un plaidoyer sur les réseaux sociaux en faveur de Michael Estera.
De ce fait, le 22 février 2019, une note de presse portant la signature des Avocats Me Emmanuel Jeanty, Me Yvon Pyram et Me Hans J. Ludwig Joseph a été publiée informant le grand public que la Firme EXPERTUS a été constituée pour Monsieur Michael Estera et s’insurge contre sa garde à vue, tout en exigeant sa libération immédiate et sa réhabilitation sociale au nom des droits fondamentaux.
Finalement, après huit jours de plaidoyer d’une part et de dilatoire d’autre part, le lundi 25 février 2019, le citoyen haïtien Michael Estera a été libéré par le juge Osner Petit Papa.
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5ème Fait : Fuite des autorités haïtiennes face à leur responsabilité sur le dossier
Alors que le Miami Herald dans une publication datée du 21 février 2019 a rapporté, d’une part que les étrangers ont été libérés parce qu’aucune charge n’a été retenue par la justice haïtienne contre eux et d’autre part que le retour aux USA de ces étrangers a été coordonné avec les autorités haïtiennes, pourtant chacune des autorités haïtiennes liée à la responsabilité de ce dossier tente de se voiler la face et de se laver les mains comme Ponce Pilate.
La Présidence et la Primature se lavent les mains
Le lundi 18 février 2019, le Secrétaire d’État à la Communication, Eddy Jackson Alexis a déclaré : « Le Pouvoir Exécutif ne saurait engager des mercenaires pour venir terroriser une population par laquelle nous avons été mandatés et nous avons la responsabilité de servir. Et il a ajouté : « À quoi bon d’engager des mercenaires ? La justice va établir ce qui s’est passé et va dire pourquoi ces hommes étaient aussi armés. »
Pourtant, deux jours après les mercenaires ont été relâchés sans aucune explication.
Le Secrétaire d’Etat à la Communication a aussi exprimé ses inquiétudes de voir un tel arsenal entre les mains d’étrangers qui n’ont aucune autorisation. Pourtant, Michael Estera a affirmé qu’il travaille à la compagnie Preble-Rish Haiti S.A depuis plus de 5 ans et que les étrangers aussi, ils étaient là pour le compte de la compagnie.
Le pire, c’est que le Conseiller du Président de la République, Jude Charles Augustin, ainsi que le Porte-parole du Premier ministre, Pascal Adrien, ont respectivement informé à la presse que le Président Jovenel Moïse ainsi que le Premier ministre Jean-Henry Céant n’étaient pas au courant du départ des étrangers vers les États-Unis d’Amérique.
Tout est si paradoxale dans cette affaire !
Si depuis plus de 2 mois les 2 têtes de l’Exécutif n’arrivaient pas à s’entendre pour diriger dignement le pays, mais sur ce coup là, ils se sont aisément entendu pour justifier leur niveau de bassesse devant le blanc et prouver au monde entier que le peuple haïtien est encore dans l’esclavage.
Pour ne pas passer inaperçu, le CSPJ se prononce aussi
Dans une correspondance adressée au Ministre de la justice en personne, le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire (CSPJ) a qualifié la décision de renvoyer en dehors d’une procédure d’extradition les sept mercenaires lourdement armés vers les USA d’«illégale et arbitraire » tout en lui rappelant que les Tribunaux haïtiens sont les seuls compétents pour connaître de toutes les infractions commises sur le territoire de la République.
Si l’Article 1 de la Loi du 13 novembre 2007 créant le CSPJ stipule : « Le Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire est l’organe d’administration, de contrôle, de discipline et de délibération de ce pouvoir. Il formule un avis concernant les nominations de magistrats du siège et met à jour le tableau de cheminement annuel de tout magistrat. Il dispose d’un pouvoir général d’information et de recommandation sur l’état de la magistrature. »
Mais où était le CSPJ lorsque cette décision a été prise ? D’ailleurs, si les étrangers ont été libérés pour défaut de charge, comment peut-on évoquer la notion d’extradition ? Pourquoi tant d’incohérence et d’incohésion au sein même du Pouvoir Judiciaire ?
Paraît-il que les autorités du Pouvoir judiciaire haïtien devraient réviser leurs notions de Droit international public et privé et mieux approfondir la Convention interaméricaine contre la fabrication et le trafic illicites d’armes à feu, de munitions, d’explosifs et d’autres matériels connexes, ratifiée par la République d’Haïti par le Décret du 18 avril 2005.
Même le Commissaire du Gouvernement se lave les mains aussi
Le Commissaire du Gouvernement près du parquet de Port-au-Prince, Paul Eronce Villard, lors d’une conférence de presse donnée le mercredi 6 mars 2019, a informé qu’il n’a joué aucun rôle dans la libération des étrangers.
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Et pour finir : Des rappels qui font mal, mais pourtant si vrais !
Alors que le Premier ministre décline sa responsabilité dans l’affaire des 7 mercenaires étrangers, rappelons-nous lors de la convocation du CSPN le 4 décembre 2018 par le Sénat de la République, comment il avait eu le courage d’affirmer qu’un véhicule officiel du Ministère des Affaires Étrangères, immatriculé OF 00090, avait interféré dans une opération que menait la Police Nationale d’Haïti pour capturer le chef de Gang Arnel Joseph ;
Rappelons-nous la fourgue qu’il exprimait lors de son discours du 16 février 2019 dernier, lorsqu’il parlait du dossier Petro Caribe, or le lendemain même, c’est un autre visage qui a fait surface lorsqu’il s’agissait maintenant d’intervenir sur le dossier des mercenaires étrangers mettant en danger la sûreté et l’intégrité nationale ;
Alors que la justice haïtienne a traité avec autant de légèreté ce dossier de mercenaires étrangers, rappelons-nous que Godson Orélus, ancien Directeur Général de la Police Nationale d’Haïti a été arrêté le 26 octobre 2018 et a passé 4 mois en détention pour trafic illégal d’armes à feu et importation illégale d’armes et de munitions ;
Rappelons-nous que Guy Philippe, ancien Commissaire de la Police Nationale d’Haïti, Sénateur élu de la Grand’Anse, a été arrêté sur le territoire national par des agent de la Drug Enforcement Administration (DEA) et immédiatement extradé aux États-Unis d’Amérique le 5 janvier 2017, pour être ensuite jugé et condamné à 9 ans de prison pour trafic de stupéfiants et blanchiment d’argent.
Tout ceci et cela confirment le manque de maturité et de prestige des dirigeants haïtiens. Nous sommes vraiment la honte de nos ancêtres !
L’Archange