Dans un contexte où le Conseil Présidentielle de Transition (CPT) tente de poser les bases d’un référendum et des élections, loin de dégager un consensus, certaines décisions suscitent de nouvelles tensions. La nomination de plusieurs directeurs généraux a provoqué de vives réactions, notamment au sein de l’Office d’Assurance Véhicules Contre Tiers (OAVCT) et de l’Office National d’Assurance-Vieillesse (ONA).
Alors que le CPT souhaite redynamiser la gestion des institutions publiques, certains observateurs, dont Dr Jean Willio Patrick Chrispin, estiment que certaines décisions risquent de déstabiliser davantage l’administration publique. Dans une interview exclusive accordée à notre rédaction ce matin, l’ancien conseiller du feu Président Jovenel Moïse, nous a livré ses impressions :
Le Médiateur : Bonjour Dr Chrispin, merci de nous accorder cette interview. Que pensez-vous des récentes nominations effectuées par le CPT ?
Dr Chrispin : Bonjour et merci de me recevoir. D’un point de vue institutionnel, le CPT a le droit de nommer de nouveaux responsables. Mais il doit aussi tenir compte des performances des sortants et des réactions que ces décisions peuvent provoquer. Prenons le cas de l’OAVCT : sous la direction de Fritzner Bernadel, cette institution a généré plus d’1,2 milliard de gourdes pour le Trésor public, tout en améliorant les conditions de travail des employés. Son départ brutal a conduit ces derniers à manifester violemment en érigeant des barricades enflammées devant le siège de l’OAVCT sur l’avenue Charles Sumner.
Le Médiateur : À quoi attribuez-vous cette réaction ?
Dr Chrispin : Lorsqu’un dirigeant instaure une dynamique positive et que, du jour au lendemain, il est évincé sans justification claire, cela crée une frustration légitime. D’autant plus que, dans le passé, l’OAVCT a connu de nombreuses crises avant que Bernadel ne stabilise la situation. Si des reproches existent contre lui, elles doivent être prouvées. Sinon, on risque de fragiliser une institution qui venait de retrouver un certain équilibre.
Le Médiateur : La nomination du directeur de l’ONA suscite aussi des interrogations. Que pouvez-vous nous dire à ce sujet ?
Dr Chrispin : Il y a effectivement une forte opposition en interne. M. Ronald Bazile est un cadre de l’ONA, et ceux qui le contestent connaissent son parcours. Plus inquiétant encore, la Directrice générale adjointe nouvellement nommée, Mme Sandra Paulemon, a refusé son poste. Son influence dans le milieu politique et médiatique pourrait galvaniser l’opposition contre le CPT, ce qui compliquerait encore davantage la situation.
Le Médiateur : Certains acteurs de la société civile demandent un sursis sur ces nominations afin d’évaluer l’intégrité des nouveaux nommés. Pensez-vous que cette prudence soit nécessaire ?
Dr Chrispin : « Ou konnen sa w genyen, ou pa konn sa w pral jwenn. » C’est une vérité incontournable. Lorsqu’un dirigeant a démontré son efficacité et a obtenu des résultats concrets, le remplacer sans une évaluation approfondie est un risque. Pourquoi écarter un dirigeant qui a apporté des avancées notables sans explication claire ?
La prudence s’impose. Il ne suffit pas de nommer de nouvelles personnes, encore faut-il s’assurer qu’elles ont l’intégrité et la compétence nécessaires pour poursuivre les réformes. Si certaines nominations suscitent des controverses, une enquête approfondie est essentielle avant toute installation. Autrement, ces décisions risquent de créer plus de tensions que de solutions.
Le Médiateur : Dr Chrispin, vous appelez à une évaluation rigoureuse des nouveaux directeurs par l’Unité de lutte contre la corruption et la Cour supérieure des comptes. Pensez-vous que ces nominations répondent aux attentes en matière de gouvernance ? De plus, vous insistez sur l’intégration de Pitit Dessalines dans le partage des responsabilités. Pourquoi est-ce crucial ?
Dr Chrispin : Chaque directeur doit prouver sa compétence. Il revient aux institutions de contrôle d’évaluer leur gestion. Concernant Pitit Dessalines, c’est un parti représentatif ayant un membre dans le conseil de transition. L’exclure du processus de nomination affaiblirait l’inclusivité et la stabilité politique recherchée.
Le Médiateur : Que pensez-vous du maintien de certains directeurs généraux
Dr Chrispin : Le maintien de certains directeurs généraux est une décision stratégique. Prenons l’exemple de l’ingénieur Yves Ducarmel François à l’AAN. Son travail est essentiel pour la modernisation des infrastructures aéroportuaires selon les normes internationales. Son maintien assure la continuité des réformes engagées. Il est crucial que les décisions soient prises dans l’intérêt des institutions et non pour des considérations politiques.
Le Médiateur : Avez-vous un message pour le CPT face à ces tensions ?
Dr Chrispin : Le Conseil doit éviter de prendre des décisions qui alimentent l’instabilité au lieu d’apporter des solutions. Il doit aussi cesser de marginaliser le parti Pitit Dessalines, qui a un représentant au sein du Conseil et qui mérite d’être traité avec équité. Comme je l’ai déjà dit : Prouvez que vous êtes à la hauteur de votre mission. Dépassez votre ego. Écoutez la voix de la sagesse. Vous mériterez alors le respect de la nation.
Le Médiateur