La situation actuelle du pays est marquée par une montée des tensions autour de la Brigade de Sécurité des Aires Protégées (BSAP). Cette unité, créée pour protéger les zones écologiques sensibles, semble aujourd’hui jouer un rôle ambigu et problématique. La récente révocation de Jeantel Joseph, ancien directeur général de l’Agence Nationale des Aires Protégées (ANAP), a exacerbé les conflits internes et externes liés à la BSAP, posant la question cruciale de la restructuration de cette brigade.
Les origines de la crise
Depuis sa création, la BSAP a pour mission de surveiller et protéger les aires protégées en Haïti. Toutefois, la situation a rapidement dégénéré, avec des membres de la BSAP se retrouvant impliqués dans des activités illégales. Des accusations ont émergé, selon lesquelles certains agents, au nombre de plus de 6000, opérant principalement dans les villes de province, agissent comme une force paramilitaire, armée et prête à défier les autorités légales.
La révocation de Jeantel Joseph
Le 22 janvier 2024, un arrêté du gouvernement de facto a révoqué Jeantel Joseph de son poste de directeur général de l’ANAP. Cette décision a été motivée par des allégations de dysfonctionnements institutionnels graves au sein de l’ANAP et de la BSAP. La réponse ne s’est pas faite attendre : des agents de la BSAP, en colère, ont fermé de force le complexe administratif de Hinche, et d’autres, à Ouanaminthe, ont déclaré attendre les directives de Jeantel Joseph.
Le rôle de la Commission de restructuration
Face à cette crise, le gouvernement de l’ex-Premier ministre Ariel Henry a décidé de mettre en place une commission technique de restructuration de l’ANAP, dirigée par l’agronome Frantz Daniel Pierre, un cadre du ministère de l’environnement, des membres Prénor Coudo, Jean Lyonel Trécil, inspecteur général de la Police nationale d’Haïti (Pnh), Verby B. Jean, lieutenant des Forces armées d’Haïti (Fadh) et Jean Neslie Élie, selon l’arrêté les nommant. La mission de cette commission est claire : évaluer les activités de l’ANAP, assurer la gestion provisoire de l’institution et proposer des mesures pour restructurer et améliorer son fonctionnement.
Où en est la commission ?
Malgré l’urgence de la situation et le mandat clair donné à la commission, aucune avancée n’a été réalisée. Selon l’arrêté du 23 janvier 2024, la commission disposait d’un mois pour accomplir sa mission, mais aucun rapport n’a été publié depuis. Les membres de la commission n’ont jamais été installés et n’ont jamais reçu leur ampliation, empêchant ainsi la commission de prendre fonction. Cette absence de résultats concrets alimente la force des agents de la BSAP, plongeant ainsi la situation sécuritaire dans les aires protégées et les régions environnantes dans un état de précarité de plus en plus inquiétant.
Les conséquences de l’inaction
L’absence d’une action rapide et efficace de la commission de restructuration a plusieurs implications graves. Premièrement, elle laisse un vide administratif et opérationnel qui permet à des éléments armés illégaux de continuer à agir en toute impunité. Deuxièmement, elle fragilise la légitimité du nouveau gouvernement, qui doit envoyer un signal clair à la population pour résoudre véritablement l’insécurité dans tous ses aspects. Enfin, elle compromet les efforts internationaux pour stabiliser Haïti et rétablir la sécurité et l’ordre dans le pays.
Que faire ?
Pour résoudre cette crise, le gouvernement du Premier ministre Garry Conille doit impérativement activer et soutenir la commission de restructuration de l’ANAP. Cela implique de fournir les ressources nécessaires et de garantir la transparence et l’efficacité des actions entreprises. De plus, une collaboration étroite avec les partenaires internationaux pourrait offrir un soutien technique et logistique crucial pour mener à bien cette restructuration.
En conclusion, la commission de restructuration de la BSAP sous tutelle de l’ANAP représente une étape essentielle pour restaurer l’ordre et la légalité dans les aires protégées d’Haïti. Toutefois, son succès dépendra de la volonté politique et de l’engagement concret du gouvernement à mettre fin aux activités illégales et à renforcer les institutions dédiées à la protection de l’environnement.
Jean-Mario Gabriel