Bonjour Haïti. Ce qui suit concerne chaque individu se sentant interpellé quand il entend quelque part citer le concept « HAÏTI / AYITI. Si tel est le cas, prenez-en votre temps, lisez, réfléchissez, pénétrez et percez ce texte. Ce ne sera pas un temps perdu !
Bizarre ! Aujourd’hui je tiens à partager avec vous une interrogation qui me préoccupe depuis un certain temps. C’est un sujet qui est souvent abordé dans nos discussions et lors même de certains grands forums auxquels je participe. Pourtant je constate toujours qu’une grande hypocrisie se dissimule derrière les interventions de mes contemporains. Peut-être, est-ce une hypocrisie héréditaire ! Car, depuis la fondation de cet État qui aurait dû être la fierté du monde en matière de LIBERTÉ, mais, nous ne nous sommes jamais mis d’accord sur des éléments qui auraient dû être indubitables et indiscutables.
Voyons… Nous ne sommes pas d’accord avec notre drapeau, nous discutons jour et nuit sur la langue, nous critiquons nos ancêtres comme des bêtes, des abrutis, des sauvages, alors que les Français eux vénèrent Clodion, Mérovée, Childeric, les premiers de la dynastie des Mérovingiens autant qu’ils admirent Louis XIV, le Roi Soleil… Pour abonder dans nos discordances, nous sommes très critiques sur le vaudou, nous sommes même très méprisants quant au sens du concept « Haïtien », lequel pourtant nous définit dans notre ensemble : « Ayisyen se chyen« , voici notre fameux slogan d’auto-humiliation. De plus, nous ne sommes même pas unanimement d’accord sur l’orthographe du nom du pays. Certains préfèrent Ayiti à Haïti.
Nous ne sommes pas en harmonie avec nous-mêmes. Nous n’exprimons aucun respect à notre propre image, notre propre identité. Nous ne savons même pas qui nous sommes. Or, chaque jour, j’entends de grands discours autour de l’identité nationale. Je pense qu’il est grand temps qu’on cesse de se mentir.
Et, l’unique moment où l’esprit de la solidarité collective se manifeste au maximum, c’est lorsqu’il s’agit de démolir ce pays. Nous vivons au détriment du pays et détruisons tous sur notre passage. Nous sommes devenus une menace pour Haïti, alors que nous devrions être les Maîtres et les protecteurs de ce territoire, car notre existence y dépend.
« Pour le Pays, pour les Ancêtres
Marchons unis, marchons unis
Dans nos rangs point de traîtres
Du sol soyons seuls maîtres »
En partant, nous trahissons chaque jour le premier couplet de la Dessalinienne qui est notre serment envers nos ancêtres.
Au fait, quelle est la valeur haïtienne sur laquelle on est tous d’accord ?
Voici l’interrogation autour de laquelle devrait se cristalliser le réveil idéologique que nous évoquons si souvent. En effet, je pense que c’est là que devrait commencer la réflexion.
Sur notre drapeau est inscrit: « l’Union fait la force« . Mais dans la pratique, qu’est-ce qui unit réellement les haïtiens ? En quoi sommes-nous unis ? Qu’est-ce qui nous aide idéologiquement à nous rapprocher ?
Je sais que sur le plan intellectuel, beaucoup se pointeront pour me fournir des réponses. Je sais que vous allez me citer de grands auteurs. Je suppose que vous allez m’étaler toute la littérature qui est déjà produite autour de l’identité des peuples. Merci d’avance… Moi aussi, j’en ai beaucoup lu !
Mais qu’en est-il de la pratique ? Quand est-ce que finalement allons-nous nous décider de sortir de cet état merdique dans lequel se plonge le pays ? Quand est-ce que nous serons conscients que nous avons un pays à construire? Quand finalement allons-nous décider de rationaliser nos pensées, nos propos et nos actions ?
Croyez-moi si vous voulez, cette notion d’identité ne revêt pas seulement un caractère intellectuel, comme nous l’abordons fort souvent dans nos discours ou lors de nos grandes démonstrations de savoir et d’éloquence. Elle est beaucoup plus fondamentale, elle est pragmatiste. L’identité d’un peuple émane de lui-même. Ce n’est pas aux autres de nous dire qui nous sommes. Mais de toute évidence, ils pourront dans certaines mesures déduire qui nous sommes à partir de nos comportements collectifs. Alors, que représente un haïtien aujourd’hui aux yeux du monde ?
Pour être plus précis, je veux vous faire comprendre que les images collectives négatives que nous projetons aux yeux du monde auront des répercussions négatives aussi sur chaque haïtien. Personne n’est innocent face aux conséquences des turbulences qui s’agitent au quotidien dans ce pays.
Ainsi, si nous voulons sortir ce pays de ce chaos politique, une prise de conscience individuelle est urgente pour chacun individu qui se sent interpellé quand on dit : Haïtien. Ce n’est que par cette étape que nous parviendrons à l’état de conscience collective nécessaire pour agir ensemble dans le sens positif du développement.
Au fond, je ne sais pas pourquoi, mais je reste encore très attaché à ce pays si maltraité qui ne donne que l’envie de partir, de fuir et de ne jamais y retourner. Parfois je me mets dans la peau de ceux et celles qui choisissent cette voie. Je les comprends et je leur pardonne. Mais il faudra de toute évidence, des gens pour assumer le destin de ce pays. Et, parmi les 10% de la population qui constitue l’Élite intellectuelle dont j’en fais partie comme beaucoup d’entre vous qui me lisent en ce moment, il faudra toujours des gens pour parler pour ces 90% qui regardent sans voir, qui parlent pour ne rien dire, mais pourtant sont plus nombreux et plus motivés à vouloir prendre la parole. Ironie du sort !
« Lorsque l’Élite n’assume pas l’équilibre de la société, l’inverse sera produite d’une manière ou d’une autre. »
Lorsqu’on trouvera enfin la réponse aux questions qui constituent la toile de fond de cette publication, à ce moment je saurai qu’on est prêt à construire la NATION HAITIENNE / AYITIENNE.
Stevens Gregor Gabriel, dit L’Archange
Penseur Positif Ayitien