Alors que la crise sécuritaire s’enlise depuis tantôt trois ans, d’anciens Premiers ministres haïtiens brisent le silence et fustigent des sanctions étrangères qu’ils jugent arbitraires, illégales et politiquement instrumentalisées. Accusant d’anciens dirigeants des États-Unis, du Canada de bafouer les droits fondamentaux. Ils dénoncent également une dérive dangereuse sous couvert de lutte contre l’impunité, et exigent la mise en place urgente d’une enquête indépendante pour faire toute la lumière.
Dans un communiqué officiel publié ce lundi 9 juin, le Forum des Anciens Premiers Ministres d’Haïti (FAPM) monte au créneau face aux sanctions étrangères imposées à plusieurs personnalités haïtiennes. Ils dénoncent une « dérive politique » de mesures censées cibler les chefs de gangs, mais qui s’abattent sur des anciens responsables sans preuve ni procès.
Selon le FAPM, ces sanctions, initiées en 2022 sous l’égide de la résolution 2653 du Conseil de sécurité de l’ONU, ont été reprises unilatéralement par des pays comme le Canada, les États-Unis ou la France, « sans transparence suffisante, ni procédure de recours, ni publication d’éléments probants ».
« La légitimité morale d’une lutte contre l’impunité ne saurait justifier la suspension des droits fondamentaux », écrit le Forum, qui juge que ces mesures violent les principes de la présomption d’innocence et du droit à un procès équitable.
Le Forum alerte sur les conséquences sociales et diplomatiques de ces sanctions appliquées hors de tout cadre judiciaire : « L’impact social et professionnel est dévastateur pour les personnes visées », tout en notant l’absence de réponse des autorités étrangères malgré plusieurs requêtes.
« Des sanctions infligées sans lien avéré avec les gangs peuvent être perçues comme des interférences politiques inacceptables », déplore le communiqué signé par l’ancien Premier ministre Evans Paul
Face à cette situation, les anciens Premiers ministres réclament la mise en place « d’une commission indépendante et mixte » pour réexaminer les dossiers, la suspension temporaire des sanctions sans preuve rendue publique, et l’ouverture urgente d’un dialogue diplomatique structuré entre Haïti et ses partenaires.
Ils concluent : « Haïti ne se relèvera pas par la stigmatisation, mais par le renforcement de ses institutions et la réhabilitation d’une justice impartiale. »
Mario Jean-Pierre