Alors que Théophil Ostinvil va prendre officiellement les rênes de la Direction Générale de la DINEPA, il serait irresponsable de considérer son installation comme une clôture définitive des interrogations qui entourent sa gestion passée. Bien que reconnu pour sa formation et son expertise, son passage à la tête de l’OREPA Centre a laissé derrière lui une série de soupçons d’irrégularités administratives et financières qui, jusqu’à présent, n’ont jamais été élucidés.
Une correspondance du 22 juin 2023, adressée par la Direction Générale de la DINEPA, dont Le Médiateura eu copie, faisait état d’anomalies inquiétantes. On y rappelait que, malgré sa démission pour « convenances personnelles », M. Ostinvil avait quitté son poste sans autorisation formelle, contrairement aux règles administratives en vigueur. Plus troublant encore, cette même correspondance mentionnait que « suite à certaines irrégularités administratives et/ou financières constatées en 2020 au niveau de l’OREPA Centre », une demande de vérification avait été envoyée à l’Inspection Générale des Finances (IGF). Une telle initiative n’est jamais anodine et indique que des doutes sérieux planaient déjà sur sa gestion.
De plus, toujours selon notre source, dans une autre correspondance du 8 mai 2023, la Direction Générale instruisait M. Ostinvil de « mettre tous les dossiers à la disposition de la commission d’éclaircissements », dans le cadre d’un conflit l’opposant à l’ex-Administrateur de l’OREPA Centre. Cette commission, chargée de clarifier des dettes non justifiées et des dépenses issues de fonds internationaux (notamment de la BID, de l’AECID et du CDC), souligne la nécessité d’une enquête rigoureuse — une nécessité qui, curieusement, semble avoir été mise en veilleuse.
Maintenant qu’il va être installé à la tête de la DINEPA, la question n’est pas de savoir si l’affaire est close, mais plutôt pourquoi ces soupçons n’ont jamais été levés de manière transparente. Dans un contexte où la corruption alimente directement l’insécurité et le financement des gangs armés, il est impératif que la Cour Supérieure des Comptes et du Contentieux Administratif (CSCCA) et l’Unité de Lutte Contre la Corruption (ULCC) prennent leurs responsabilités. Une enquête approfondie sur la gestion de M. Ostinvil à l’OREPA Centre s’impose, non pas pour nuire à sa carrière, mais pour restaurer la confiance dans une institution aussi stratégique que la DINEPA.
Comme le dit un adage bien connu : « On ne nettoie pas avec les mains sales ». Si Théophil Ostinvil veut prouver qu’il mérite ce poste, il doit être le premier à réclamer une reddition de comptes complète. À l’heure où le pays se bat pour restaurer la transparence et la probité dans la gestion publique, la DINEPA ne peut se permettre de fonctionner sous le poids de la suspicion.
Son installation prochaine n’est donc pas une fin, mais bien le début d’un impératif moral et administratif : faire toute la lumière sur cette gestion douteuse, afin que la lutte contre la corruption en Haïti ne soit pas qu’un simple slogan. Les autorités compétentes ont aujourd’hui l’opportunité et le devoir d’agir, si elles ne veulent pas être complices des corrompus et corrupteurs qui minent et appauvrissent la majorité des Haïtiens, confinés dans une misère atroce, sans espoir d’un lendemain meilleur.
Jean Samson Étienne