Il n’est pas Martin Gray, cet écrivain rescapé de la Shoah dont le roman Au nom de tous les miens bouleversa des générations. Mais lui aussi s’appelle Martin. Dave Martin Luther Blaise. Et lui aussi, dans un autre temps, dans un autre lieu, vient de tout perdre : sa fillette, sa mère, son épouse — trois êtres chers emportés par les flammes, en moins de dix jours. Âgé de 24 ans, Dave est aujourd’hui hospitalisé dans un état critique, gravement brûlé, après avoir été victime, le dimanche 6 avril 2025, d’un incendie domestique provoqué par une bonbonne de gaz dans sa petite maison qu’il vivait dans le lien du mariage à Delmas 95.
Au moment du drame, Dave se trouvait chez lui avec les siens : sa mère Nicole Phillipe, récemment déplacée de Poste-Marchand après l’incendie de sa propre maison à Sans-fil par des bandes armées ; sa femme bien-aimée Sarah D. Blaise, et l’une de ses deux fillettes, la petite Anaïca Blaise, âgée de seulement 4 ans. Nicole et Sarah préparaient un repas pendant que Dave jouait avec son enfant. En quelques minutes, le feu a tout consumé. L’espoir, les projets, les vies.
Les flammes ont tué les siens, les uns après les autres, dans une lente agonie : sa fillette Anaïca est décédée le jeudi 10 avril. Nicole, la mère courage qui avait déjà tout perdu à Sans-fil, a succombé à ses blessures le 14 avril. Enfin, Sarah, son épouse, a rendu l’âme le 17 avril. Trois morts en moins de dix jours. Trois funérailles à organiser. Et lui, Dave, est resté souffrant, brûlé et brisé à l’hôpital en attendant support.
Sans même savoir si sa mère, sa fille et son épouse étaient toutes décédées, Dave, souffrant mais conscient, a gémi à l’oreille de son parrain lors de la première visite de ce dernier à l’hôpital : « Parrain, je regrette que ce ne soit pas moi seul… Pourquoi ma mère ? Pourquoi ma fille ? Pourquoi ma femme ? » Un cri déchirant, à la fois d’amour et de désespoir, qui résonne comme un appel à la solidarité humaine.
Aujourd’hui, Dave espère de survivre, sur le lit de l’hôpital Médecins Sans Frontières à Tabarre, où il reçoit des soins dans la limite des moyens disponibles. Mais peut-on véritablement soigner des blessures aussi profondes, tant physiques que morales, dans un contexte aussi précaire ? Son beau-père, James Nelson, qu’il appelle affectueusement “parrain”, a confié à la rédaction du Médiateur.
« Ce n’est pas mon fils de sang, mais je l’ai élevé depuis qu’il avait trois ans. C’est moi qui l’ai accompagné dans la vie avec sa mère, pendant 21 ans de vie commune. Dave est un jeune discipliné, droit, rigoureux. Il était tout pour sa mère. Aujourd’hui, il est tout simplement anéanti », a confié James Nelson, visiblement dépassé par l’ampleur du drame.
L’homme lance un appel sincère aux autorités haïtiennes et à ceux qui peuvent. Il est urgent d’aider Dave, surtout à recevoir les soins nécessaires, dans un hôpital spécialisé à l’étranger. Car rester ici, dans son état, c’est risquer de mourir à petit feu, dans l’indifférence.
Le feu a également réduit en cendres tout ce que Dave et sa femme avaient construit : leurs effets, leurs souvenirs, mais aussi les marchandises qu’ils s’apprêtaient à vendre ensemble pour assurer un avenir digne à leurs enfants. Aujourd’hui, il ne reste plus rien. Ni la famille, ni les rêves, ni même le pain quotidien.
Sans savoir si sa mère, sa fille et son épouse sont toutes décédées, il a gémit à son parrain, je regrette que ce ne soit pas moi seulement. Pourquoi ma mère, ma fille et ma femme ?
Dans Au nom de tous les miens, Martin Gray écrivait que survivre, c’est parfois devoir apprendre à “vivre avec les morts”. Dave Martin Luther Blaise porte aujourd’hui ce fardeau. À nous, en tant que société, de l’aider à porter ce poids insoutenable.
Pour tout contact, James Nelson peut être joint au : (509) 36 18 2809.
Maryne N. Louis-Jeune